CORPS EN OEUVRE
Exposition du 12 septembre au 2 novembre 2013
Steven Cohen Daniel Larrieu Miet Warlop Franko b Daniel Linehan Marie-Caroline Hominal Fiorenza Menini Jan Fabre Gina Pane
Cycle de performances :
12 septembre : performance Miet Warlop à 20h00
12 octobre : performance Fiorenza Menini à 18h00
19 octobre : performance Daniel Linehan à 18h00
25 et 26 octobre : performance Marie-Caroline Hominal (à l’hôtel Picard -
26, rue de Picardie 75003 Paris)
le 25 octobre de 13h00 à 19h00 et le 26 octobre de 13h00 à 21h00 / performance sur réservation pour 1 personne toutes les 30 mns
+ The Dolly John Project Dolly John - poupée créée par Christine Vollard pour Daniel Larrieu - Kapok et toile de coton - Pièce unique - (dimensions) - née en 1997 "Ayant eu pendant des années Daniel Larrieu comme collaborateur, j’ai décidé de faire une pause dans ma carrière en répondant à l’invitation de Maria, d’Audrey et de Mathias d’être présente dans leur exposition "Corps en oeuvre". Mais avec une présence active, vous offrant mes bras et mon affection à la condition que vous envoyiez vos souvenirs de moi, vos dessins, vos photos de et avec moi sur l’email de la galerie - contact@coullaudkoulinsky.com. Vous retrouverez vos traces sur ma page Facebook - https://www.facebook.com/dolly.john.336. A très vite, votre Dolly John"""""
The Dolly John Project a été imaginé par Daniel Larrieu.
Maria Carmela Mini, commissaire d’exposition
Premier médium de l’artiste, le corps est sans doute en œuvre depuis l’origine de l’art. Notre argument, au seuil d’une époque, ne sera que l’hypothèse d’un rapport partiellement renouvelé de l’artiste contemporain à son matériau corps, et la recherche de ses effets.
Symptomatiquement seront ici considérés les travaux de performeurs, non seulement parce que leur corps est « par nature » mis en œuvre, mais surtout pour ce que cette posture induit dans une définition plus générique de création : il est aujourd’hui évident que la prise de risque, la mise en épreuve, en danger de l’être et du corps de l’artiste au service d’un propos et d’une forme ne suffisent pas à définir sa pratique.
Partant, ce corps médium, plus que les autres éloquent ou manifeste, peut aussi n’être envisagé qu’au titre de médium le plus approprié à exprimer à un moment et dans des circonstances donnés le propos de l’artiste. Celui-ci n’est performeur, plasticien, vidéaste… qu’au rapport d’une forme opératoire dans l’intention de l’œuvre.
En levant ainsi les catégorisations formelles, on approche plus certainement la motion vers l’acte d’art, en ouvrant en particulier deux perspectives :
à nouveau et encore, celle de la richesse du corps envisagé dans la multiplicité de ses ressources : machiniques et plastiques, organiques et psychologiques au service de la création… Le matériau n’est pas épuisé et il est stimulant d’en scruter les frontières nouvelles.
de façon plus maligne, celle de la création non performative des performeurs dont les artefacts révèlent un rapport consubstantiel à la performance, réelle ou implicite, et sont porteurs d’une résonance inédite. L’artefact peut autant constituer un bornage du processus de création qu’être dans sa nature le fruit de l’intention artistique. De la même façon qu’il peut embrasser, en complète légitimité, les arguments classiques liés à son apparence formelle, ou à l’inverse en nier le fondement.
La manière de composer, d’une part, comme l’analyse de l’œuvre, d’autre part, rencontrent ici une démultiplication des articulations du geste qui constitue, sur un champ imprévu, un apport des dernières décennies. Il résulte ainsi de notre hypothèse que l’objet, l’espace, l’approche, la trace ou l’impression… - tout comme le corps - ont conquis à l’épreuve de la performance une dimension que le champ antérieur des formes ne leur avait pas ouverte. Il résulte en miroir que cette dimension ne manque pas d’exercer son aspiration sur le champ antérieur.
Quelle est dès lors la place en oeuvre du corps ? Quels en sont les stigmates ? Qui les reçoit ?
Ces interrogations vivement éprouvées m’ont fait accepter sans réserve le commissariat d’exposition qu’Audrey Koulinsky et Mathias Coullaud m’ont proposé. Ma légitimité en la matière résulte du parcours de programmatrice et de productrice : depuis 1993, je regarde, j’accompagne et produis des artistes qui, bien qu’identifiés sur le champ des arts de la scène et de la performance, ont une importante production d’art visuel ou d’œuvres plastiques. Depuis 2003, le festival Latitudes Contemporaines que je dirige, tout particulièrement ouvert aux libertés formelles, l’a souvent illustré.
La proposition d’Audrey et Mathias m’a d’ailleurs valu d’appréhender combien la programmation annuelle des Latitudes à Lille et à Bruxelles s’est apparentée au « commissariat » d’art comtemporain, liant au service d’un propos des choix d’artistes, d’environnements et espaces appropriés à leur présentation, ordre et rythme, avant ou après qui ou quoi… Ces questions articulent ma reflexion lorsque je construis les programmes des Latitudes Contemporaines.
Mon défi est ici, en rendant compte de la variété du vocabulaire mis en œuvre par l’artiste, d’en révéler le substrat de performeuse ou de performeur au travers des installations, photos, vidéos et différents travaux plastiques. J’aimerais que le visiteur reparte avec l’intuition de la globalité, de l’unité du travail de création.
Les artistes que j’ai choisis dans cette perspective sont de générations et de parcours différents ; il m’a en effet semblé pertinent de tirer un fil entre les années 1970 et aujourd’hui. Ainsi de Gina Pane à Miet Warlop, on croisera Jan Fabre, Franko B, Daniel Larrieu, Fiorenza Menini, Steven Cohen, Daniel Linehan et Marie-Caroline Hominal, qui tous engagent leur corps dans l’œuvre, le mettant en danger, en faisant un objet politique… Mais ils illustrent aussi à mon sens l’indissociabilité de leurs actes performatifs ou de scène et de leurs travaux plastiques.
Je ne manquerais pas de remercier ici Audrey et Mathias pour leur audace à accueillir une proposition non conforme, à accompagner l’aventure d’artistes inclassables. Cette confiance m’offre, en leur rendant hommage, de souligner la richesse de leur contribution composite et polymorphe à la création de notre temps.