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SHARE/PARTAGER - Congres international - 25_27 janvier 2024

SHARE /PARTAGER EVERYDAY AESTHETICS AND COLLECTIVE GESTURES

Direction : Barbara Formis

25-27 janvier 2024

entrée libre sur inscription via ce lien

site web : Everyday Aesthetics & Collective Gestures

= 2 SITES :

CONFÉRENCES

- Université Paris 1, Panthéon Sorbonne, 12 place du Panthéon 75005 PARIS (salle 6) = se présenter à l’accueil

- Ecole des Arts de la Sorbonne, 45 rue des Bergers, 75015 PARIS (Amphithéâtre)

EXPOSITION & PERFORMANCES
- Galerie Michel Journiac, 45 rue des Bergers, 75015 PARIS
- Sorbonne Art Gallery, Université Paris 1, Panthéon Sorbonne, 75005, PARIS (Galerie Soufflot)

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PROGRAMME COMPLET

* La majorité des conférences sont en anglais. Les communications en Français ainsi que les tables rondes traduites simultanément sont indiquées dans ce programme

En cette période de crises politiques et écologiques, il est nécessaire de questionner l’idée de l’art comme domaine autonome et de l’artiste comme citoyen doté d’une vision supérieure. Nombreux sont ceux qui continuent de penser que l’esthétique s’intéresse principalement à la notion d’imagination et de beauté et qu’elle est intrinsèquement limitée au monde de l’art. Néanmoins, s’il est vrai que l’esthétique a une relation privilégiée avec le processus créatif et l’expérience des œuvres d’art, il est également vrai que l’esthétique dépasse les limites du monde de l’art.

En revisitant la notion inaugurale d’aisthesis en tant qu’expérience sensible et cognitive, nous soutenons que l’esthétique ne peut être confinée à des règles préexistantes ou à un domaine métaphysiquement autonome. Au contraire, l’esthétique est ancrée dans les situations, les affects et les pratiques humaines, remodelant constamment nos formes de vie. L’esthétique, en tant qu’expérience et théorie du sensible, est essentielle pour analyser le tissu relationnel et pluriel de nos actes, nos gestes et nos comportements quotidiens.

Dans ce cadre, l’Everyday Aesthetics en tant que courant philosophique qui a pris de l’ampleur au 21ème siècle, apporte une contribution significative à notre projet puisqu’elle permet d’explorer les aspects esthétiques de notre vie quotidienne, en soulignant la nature relationnelle et collective des expériences esthétiques. En examinant les gestes ordinaires, l’Everyday Aestethics remet en question les frontières traditionnelles qui confinent l’esthétique au domaine de l’art (voir : Saito 2007, 2017 ; Leddy 2012 ; Melchionne 2014 ; Naukkarinen 2013). L’Everyday Aesthetics est particulièrement utile pour comprendre l’esthétique en tant qu’expérience collective et partagée, en revenant à " l’esthétique de l’engagement " (Berleant 1991), à " l’esthétique intégrée " (Brady 2003) ou à la " somaesthétique " (Shusterman 1992).

Durant l’expérience esthétique nous n’engageons pas avec de simples " choses " individuelles, mais nous nous mettons plutôt en relation avec ce qui pourrait être mieux décrit comme des phénomènes et des processus s’inscrivant dans un réseau de relations écologiques dont les humains font partie et qu’ils ou elles ne contrôlent pas. Ce changement d’approche permettrait une syntonie perceptive, un travail continu d’ajustement au flux de l’expérience (Haraway 2016) afin de comprendre que l’esthétique est à la fois optique et opérationnelle (Matteucci 2019), engagée et haptique (Perullo 202) mais aussi reliée à une expérience ordinaire mêlée au langage (Dreon 2022). La notion de collectivité et les méthodes de l’Everyday Aesthetics sont essentielles pour dépasser les dualismes rigides : passivité-activité ; perception-expression ; esprit-corps ; individu-environnement ; fonction-forme ; art-non-art ; général-particulier ; quantité-qualité ; réel-virtuel ; technologie-biologie ; consommation-durabilité. Les conséquences ne sont pas seulement esthétiques et culturelles, mais aussi politiques, écologiques et cognitives.

La notion de geste paraît cruciale puisqu’elle rend compte des modes de relations multiples à la charnière entre l’intellect et la sensation. Nos vies quotidiennes sont intrinsèquement collectives, interconnectées pour le meilleur et pour le pire, et le processus d’élaboration du sens par les gestes s’inscrit dans un spectre de relations et d’efforts multiples qui peuvent aussi entraîner des risques de mauvaise communication. Comment les gestes nous permettent-ils de penser et de créer ? Et comment la matière sensible du geste est-il collectivement partagé ? En nous inspirant du pragmatisme (Dewey 1934) et d’une vision non dualiste de l’esthétique, nous soulignons l’importance des gestes pour donner du sens à notre vie. Dans les sciences humaines et sociales, diverses approches et études ont été consacrées à la question du geste, notamment en anthropologie, ethnologie, sociologie et sémiotique, en ouvrant la possibilité d’un nouveau champ linguistique récemment nommé gesture studies (Kendon 2004 et Mc Neill 1996 ; 2005) et en inspirant des études culturelles et littéraires sur les " styles " de vie (Macé 2016 ; Highmore, 2010, 2023).

Comme l’avait analysé le second Wittgenstein, les gestes et les jeux de langage trouvent leur sens dans l’usage ordinaire ; ce qui ouvre la voie à une philosophie du geste qui a été aussi poursuivie par Peirce, Merleau-Ponty et Deleuze, montrant que la production de sens émerge d’une situation où se mêlent désirabilité, probabilité et indétermination et où la portée du faire et de l’agir ne peut pas être réduite au processus d’individuation. Plus récemment, une philosophie émergente du geste a commencé à développer les notions de " intermédiation " (Agamben 1996 et 2017), de " migration " (Noland & Ness 2008 ; Noland 2009), de " synthèse " (Maddalena 2015), de " minorité " (Manning 2016). Cette tendance philosophique pourrait être comparée aux questionnements autour de la collectivité et de la " relationnalité " au sein des études sur l’art performance (Jones 2020, Jackson 2011) ou des études décoloniales (Glissant 1990).

L’émergence d’une philosophie du geste, liée à l’esthétique et à la pratique artistique, implique une relation à l’altérité et remet en cause les notions traditionnelles d’identité et d’individualité du moment que le geste est compris comme intrinsèquement multiple et collectif car nécessairement transmis et hérité. Le concept de geste permet, d’une part, une différenciation plus précise entre les habitudes, les expériences, les actions, les mouvements, les manières de vivre et, d’autre part, de reconcevoir l’esthétique comme un domaine vivant et dynamique, comme une expérience qui possède une nature intrinsèquement relationnelle.

Les méthodes et pratiques de l’art participatif sont également importantes dans cette perspective de recherche, du moment qu’elles considèrent l’expérience collective comme une pratique émancipatoire. Historiquement, et dans une ligne pragmatiste, les Happenings, le mouvement Fluxus et la danse postmoderne ont déjà contribué à redéfinir l’expérience de l’art dans une continuité avec la vie ordinaire. Cela aurait permis dans un deuxième temps de réintroduire dans le monde de l’art l’idée d’une " esthétique relationnelle " (Bourriaud, 1998). Aussi, l’art participatif en tant que " socially-based " aide à développer les idées de l’art comme " co-création " (Finkelpearl 2000 ; Kester 2013) ou comme " engagement " (Bishop 2012).

Comme l’a montré Jacques Rancière (2000), le partage est à la fois une question d’esthétique et de politique. La démocratie et la participation ne peuvent pas être réduites à une préfiguration de l’unité (comme dans de nombreux concepts de " communauté "), mais renvoient aux comportements comme étant à l’intersection de l’activité et de la passivité, de l’être mû et du mouvement. Une enquête sur ces comportements partagés permettrait de démanteler une conception substantialiste de l’individualité. Nous pourrions ainsi nous engager dans l’investigation des actions collectives qui transcendent les limites de l’esthétique en tant que discipline axée uniquement sur la contemplation et la beauté réflexive. On éviterait ainsi de réduire l’esthétique à l’expérience d’un sujet seul face à un objet pour l’approcher davantage de l’idée d’un savoir situé (Haraway 1988). La variété des expériences esthétiques montre que le vital et le social s’entremêlent constamment pour former un ensemble qui est dans une condition perpétuelle de tension, recul et transformation potentielle.

Nous invitons des contributions qui explorent la manière dont les pratiques esthétiques sont organisées et transformées lorsqu’elles cherchent à s’éloigner du monde de l’art pour s’immerger dans les formes de la vie humaine en les transformant. Les articles ou les œuvres d’art sélectionnés exploreront la coexistence de matériaux hétérogènes, les processus d’interaction et de négociation ainsi que la complexité des situations collectivement partagées.

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